J'ai passé sous un camion en 1980 après un accident de moto. Je ne vois plus la mort de la même façon.» Heinz Arbenz, 46 ans, un ancien boulanger argovien aujourd'hui agent dans une société de sécurité, décide en janvier 2004 de donner son corps à Gunther von Hagens, 60 ans, l'inventeur de la plastination. «J'ai visité une exposition à Francfort (D). Je me suis décidé rapidement», a confié l'Alémanique, tout sourire, qui a participé à un rassemblement de quelque 500 donneurs ce week-end à Heidelberg, en Allemagne. Outre l'Argovien, Rosmarie Parrat, une Zurichoise de 50 ans, représentait aussi l'Helvétie dans la capitale de la sculpture façonnée sur la base de cadavres.
Le jour où Heinz va tirer sa révérence, c'est Sandra, 41 ans, son épouse, une secrétaire au bureau du personnel de l'EPFZ, qui aura la charge de faire livrer son corps en Allemagne. «Le transport va coûter au moins 5000 francs», sait déjà le candidat à l'éternité dans l'acétone. Une somme à la charge de son héritière, même si Heinz entend créer un compte pour ses étranges funérailles.
De plus, afin d'éviter que ses organes ne soient acheminés sur un hôpital qui en aurait un urgent besoin, Heinz Arbenz porte sur lui en permanence une carte de donneur particulière: ses restes doivent être gardés au frais dans l'attente de son ultime voyage à Heidelberg dans l'antre de celui que les Allemands surnomment déjà «Dr La Mort».
HEINZ ARBENZ L'Argovien pose avec
un des cadavres sculptés par la méthode
du «Dr La Mort». Vigile, il a fait des rondes
à l'université et a vu des planches anatomiques,
des résultats de dissections. Il en est ressorti fasciné.
Une autre motivation de l'Argovien réside dans l'exercice de son boulot de vigile. «Au cours de mes rondes à l'université, j'ai vu des planches anatomiques, des résultats de dissections. J'étais fasciné. Je suis aussi persuadé que les gens ne savent pas comment se préparer à la mort. Quand on sait ce qu'il adviendra de son corps, on peut plus facilement lâcher prise.»
Son épouse, Sandra, a contemplé pour la première fois le résultat d'une plastination. «C'est moins terrible qu'un corps dans un cercueil.» Quant à la personnalité controversée de Gunther von Hagens, à qui les médias allemands ont reproché d'usurper son titre de Professor, d'avoir utilisé les corps de suppliciés chinois à leur insu et d'être le fils d'un SS de la Seconde Guerre mondiale, cela ne gêne guère Sandra. Pas même le fait que la finalité scientifique de la plastination est aussi régulièrement mise en cause. «Après tout, Léonard de Vinci était lui aussi à la fois un scientifique hors pair et un très grand artiste.»
Autre donneur, autre parcours. Rosmarie Parrat, ancienne acrobate devenue maman de jour, avoue ressentir un grand plaisir à se montrer en public. Le coup de foudre pour la plastination, elle va le ressentir très fort dans un tram zurichois. «L'image d'une publicité pour l'exposition de Gunther von Hagens qui s'est déroulée à Bâle à la fin de l'année 1999 m'a frappée de plein fouet. J'étais fascinée, enthousiasmée.» Elle visite l'expo et décide spontanément d'offrir son corps aux manipulations du «Dr La Mort». «Je l'avoue, j'ai toujours eu un penchant exhibitionniste. J'ai déjà posé nue pour des amis photographes et j'ai été modèle dans des classes des Beaux-Arts», explique la célibataire, qui dit «n'avoir aucun problème avec l'idée de présenter un jour au public des parties de son corps après son décès». Même ses cheveux, s'il le faut. Bien avant de pouponner pour des mères absentes, Rosmarie Parrat évoluait dans les airs sous les chapiteaux. Elle y présentait un numéro dont le clou consistait à évoluer dans les airs juste attachée par la crinière à un trapèze.
La Zurichoise se rend régulièrement à Heidelberg. «Je participe à des rencontres avec d'autres donneurs. Et je me tiens informée des dernières découvertes et nouvelles préparations réalisées.» Si dans son entourage sa démarche rencontre de l'incompréhension, Rosmarie Parrat n'entend par revenir pour autant sur une décision qui, dit-elle en substance, concerne son propre corps.
© Le Matin Online
Je sais, vous allez dire : "ça y est, DanaScully nous en remet une couche !" C'est plus fort que moi désolée
Je veux juste avoir votre avis, sur ce genre de "pratique", et si vous, vous accepteriez une telle chose pour vous-même... !