Citation:
Je suis intimement persuadé qu'il y a " quelque chose " au-dessus de nous d'infiniment puissant. Mais je ne pense pas que ce soit Dieu comme on l'entend.
Tout le monde sait que notre galaxie, je veux parler de toutes les planètes, lunes, étoiles, etc. se sont formées par agrégation de matières gazeuses, chimiques et minérales. Évidemment, il a sûrement fallu des milliards et des milliards d'années pour que ça prenne forme et que ça arrive au résultat que l'on connaît tous.
Je crois que ce qui te choque, consciemment ou inconsciemment, dans l’idée d’un être créateur de l’univers, c’est une certaine vision de la création. La vision d’un
deus ex machina, du Dieu barbu de Michelange déchirant l’espace-temps, bousculant l’agencement des causalités secondes, et apparaissant, comme une personne surnaturelle, à un endroit donné à un moment donné.
Mais cette vision est héritée à la fois des mythologies anciennes, du mécanisme cartésien et du fixisme cosmique aristotélicien.
Des mythologies anciennes, d’abord, à une époque où nos connaissances de l’univers et de son organisation « permettaient » encore d’envisager une apparition divine sous la forme d’une épiphanie localisée faisant fi des lois naturelles.
Du mécanisme cartésien, ensuite, dans la mesure où, depuis le philosophe français, la notion de la création divine est calquée, par une analogie qui n’a pourtant pas lieu d’être, sur celle de la fabrication humaine. En effet, toute machine, artificielle, se construit par une intervention extérieure, un assemblage de pièces venues du dehors (par rapport à la machine). Or, la nature ne fonctionne pas comme une machine. C’est
du dedans qu’elle se meut, qu’elle s’organise (division des cellules, croissance, …).
Du fixisme cosmique aristotélicien, enfin, en ce que le Stagirite, malgré tous ses mérites de philosophe naturaliste (qui dépassent même, je pense, ceux de Platon) n’envisageait l’univers que comme un système fixe. Or on sait aujourd’hui qu’il s’agit, à l’inverse, d’un système dynamique (et donc entropique), qui évolue sans cesse.
Pourtant, il n’est nul besoin de forcer les lois naturelles pour admettre la possibilité d’une création. Une création continuée, qui épouserait étroitement le principe d’évolution caractérisant la matière.
Au niveau ontologique, on peut parfaitement reconnaître la transcendance d’un être nécessaire différent de l’univers (Dieu), tout en soutenant, au niveau physique, une nécessaire immanence de l’intelligence organisatrice de cet être.
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Mais la question est : la moindre petite particule minérale, le moindre petit atome, car pour qu'il y ait accumulation de matières, il faut logiquement qu'il y ait de la matière. Donc, ce tout petit bout de matière... d'où vient-il ? Comment est-il apparu ? Il a bien fallu qu'il arrive de quelque part.
Beaucoup me répondront qu'il s'agit là de l'oeuvre de Dieu. Je respecte cette version, même si je ne la partage pas. Cependant, je reste convaincu, comme je vous le disais au début que "quelque chose" d'infiniment puissant nous gouverne. Et est à l'origine de tout ça.
Je constate, pour ma part, que tu n’es en fait pas si athée que ça, dans la mesure où tu ne partages pas les présupposés du matérialisme classique, à savoir la formation de l'univers par le seul hasard.
Et en effet, l’explication par le hasard est tellement peu satisfaisante, eu égard à la formidable complexité de l’univers, que nombreux sont les physiciens et biologistes qui préfèrent s’appuyer sur la notion de loi
naturelle.Cette loi naturelle, encore mystérieuse (je veux dire par là : encore loin d’être expliquée dans sa totalité), les philosophes grecs lui donnaient déjà un nom. « Noûs » pour Anaxagore, « Logos » pour les Stoïciens.
C’est aussi ce que pense le monothéisme hébreu. La différence entre les philosophes grecs et les monothéiste résidant dans l’attribution de cette intelligence. Pour les Grecs, elle était l’émanation de la nature (panthéisme), pour les Hébreux, celle d’un être différent de l’univers.
Citation:
Mais qu'y-a-t-il au-delà de cet univers?
Je n'arrive pas à me faire à l'idée que c'est infini
Tout le monde a dû se poser cette question, et arriver à ce stade de la réflexion : si l’univers a des limites, qu’y a-t-il derrière, mais d’un autre côté, comment imaginer un univers spatialement infini (surtout dans la mesure où l’on pense qu’il a un commencement) ?
En fait, et si nous étions aujourd’hui dans la situation de nos lointains ancêtres, pour lesquels il était inconcevable que la terre soit ronde ? Il est parfaitement logique et de bon sens de penser que les antipodes sont une chose impossible, tant qu’on a pas admis le principe de gravitation…
De même, il n’est pas possible d’envisager un univers fini ou infini tant qu’on a pas découvert une loi permettant de surmonter cette aporie.
De la même manière que les difficultés d’un monde conçu en deux dimensions (terre plate) s’évanouissaient lorsque l’on ajoutait une troisième (terre sphérique), peut-être que les nôtres disparaîtraient si une quatrième dimension venait s’ajouter à notre conception de l’espace ? Pardonnez l’approximation mathématique, mais peut-être sommes-nous à la surface d’une boule à quatre dimensions ?
Bien sûr, cela est de la spéculation. Mais de la spéculation partagée par quelques physiciens, d’après ce que je crois savoir.
Citation:
Comment dire... Je ne pense pas que la naissance de l'univers soit l'oeuvre de Dieu comme on l'entend. Là je parle de " Dieu " par rapport à la bible. Et même, lorsque l'on reprend la définition du mot dieu, c'est le principe d'existence et de conception du monde. Donc, Dieu en serait à l'origine.
Mais étant athé, je ne crois pas en un dieu qui gouvernerait tout ceci et en serait à l'origine. C'est difficile à dire.
Ce qui m’étonne un peu, c’est que tu sembles dire : « je ne crois pas en Dieu
parce que je suis athée ».
Alors que logiquement, on dit plutôt : « je suis athée parce
que je ne crois pas en Dieu »…
Tu vois la différence ? C’est un peu comme si tu t’interdisais d’admettre l’existence d’un Dieu créateur à la seule raison que tu t’es, au préalable, défini comme athée…
Mais en général (enfin, théoriquement), on se dit athée
après avoir donné ses raisons pour ne pas croire en l’existence de Dieu…
Citation:
C'est pour ça que j'emploie le mot entité. Car pour moi, il s'agit d'autre chose de beaucoup plus complexe. Un esprit supérieur.
Evidemment vous me direz: - Oui bah ton entité, c'est comme une sorte de dieu en quelque sorte ! C'est vrai, mais je ne veux pas employer ce mot pour justement éviter ce labsus ou ce rapprochement de Dieu dans la bible.
Là non plus, je ne comprends pas très bien, parce que tu accordes à cet « esprit supérieur » les caractéristiques d’être nécessaire que la Bible, précisément, reconnaît à celui qu’elle nomme YHVH-Adonai-Elohim (en hébreu). Pour les théologiens hébreux qui ont rédigé la Bible, en effet, Dieu se définit lui-même comme « être nécessaire ». Ce qui implique, au regard de l’univers (contingent) : esprit (infiniment) supérieur.
Citation:
Oui voilà, en fait c'est le terme " Dieu " qui me chiffonne.
A cause des connotations que tu peux en avoir (négatives, apparemment), sans doute…
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Si il y a un Dieu, une entité ou un truc du genre, qu'est ce qu'il peut attendre de l'univers qu'il a créé ?
C’est une question seconde, par rapport à celle de savoir s’il existe ou non. Mais c’est une question essentielle.
Toute l’histoire du prophétisme hébreu en propose une réponse.
J’ajoute qu’on peut dire : oui, mais pourquoi croire les Hébreux et pas, je ne sais pas, les bouddhistes ? Je dirais simplement que le Bouddhisme, fort vénérable doctrine et philosophie (et religion, si l’on admet le terme), ne reconnaît pas l’existence d’un tel créateur transcendant. Par conséquent, on va chercher, logiquement, du côté de ceux qui en parlent.
Citation:
En plus, rien ne nous dit qu'il ne peut pas le détruire, instantanément sur un coup de tete pour le reconstruire d'un autre facon
?
Rien ne le dit, en effet. Mais le contraire est également vrai…
Citation:
Est ce qu'il attend quelque chose des créatures "intelligentes" qu'il a crée, nous par exemple ?
Comme je le disais quelques lignes au-dessus, ça, c’est un problème qui concerne l’hypothèse métaphysique et théologique hébraïque, et l’attitude que l’on a à son égard. En gros : si l’on reconnaît l’existence d’un dieu créateur (non par adhésion irrationnelle en une révélation, mais par voie de théologie naturelle, c’est-à-dire métaphysique rationnelle), on donne un point en faveur de l’hypothèse hébraïque. La question est de savoir : continue-t-on sur cette voie, et accorde-t-on quelque crédence supplémentaire au prophétisme hébreu ?
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Plus sérieusement, Chamsy, tu dis, si j'amplifie tes propos exagérement, que cette entité supérieure à tout attend de nous un gros "Merci". Je ne suis pas tout à fait d'accord avec cela...
Personnellement, moi non plus. Si l’on en croit la théologie hébraïque dans sa branche chrétienne, l’entité supérieure offre une possibilité : celle d’une participation intime de la créature à la nature du créateur. C’est tout ce qui découle de la doctrine de l’incarnation.
Evidemment, on peut ne pas adhérer à cette théorie. Mais je veux seulement dire qu’elle n’a rien d’illogique si on la replace dans le contexte général, dans la génétique de la métaphysique hébraïque depuis les textes de la Genèse.
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Si Dieu peu créer l'univers, (tâche immense si l'en est),
Tâche immense d’un point de vue strictement anthropocentrique…
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alors on peut aisement concevoir qu'il puisse fabriquer d'autres entités à son image, ses enfants en quelque sorte
Certes, mais des « enfants » à entendre selon un sens analogique, et non littéral.
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Pourquoi prendrait-Il un malin plaisir à nous laisser nous détruire ainsi. Car soyons lucides, la Terre ne s'est jamais aussi mal portée, et depuis le commencement des temps... du moins depuis l'apparition de l'homme, celà n'a cessé de croître.
D’abord, toutes les époques ont pour caractéristique de dire : « c’était mieux avant, ça n’a jamais été aussi horrible ! ».
Ensuite, de la même manière qu’on ne parle que des trains en retard et jamais de ceux qui arrivent à l’heure, et à moins d’adopter une vue purement luthérienne sur la nature de l’homme, on peut quand même reconnaître que l’être humain, s’il est capable du pire, est aussi capable du meilleur. Chacun trouvera les exemples qu’il voudra. Même au cœur d’Auschwitz, on a assisté à des actes de pure bonté gratuite.
Plus généralement, le mal, qui n’apparaît sur terre qu’avec des entités capables de le commettre, est intimement lié au libre-arbitre humain.
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De toute façon , c'est claire, l'humanité va disparaître sur Terre, comme ont disparu les autres civilisations ou les dinosaures....
Méfions-nous des prophéties ! Même celles qui apparaissent les plus évidentes…
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Sérieusement, comment peut-on savoir dans quel but l'univers a été créé.
Par observation et induction, en regardant l’univers… En partie…
Mais plus logiquement, si l’univers est créé par une entité intelligente dans un but particulier, on peut aussi imaginer qu’il a laissé des indices derrière lui, des conseils, des recommandations. Là encore, on en revient à la révélation par l’intermédiaire du prophétisme.
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Tu parlais de la punition d'Adam et Eve, de la Tour de Babel... mais là je ne vais pas pouvoir te rejoindre là-dessus car je n'y connais rien Je n'ai même pas feuilleté la bible Peut-être qu'un jour... !
Sur Adam et Eve, attention ! C’est une idée théologique exprimée sous forme de récit, d’analogie (« parabole »). « Adam », en hébreu, n’est pas un nom propre, mais un nom commun qui veut dire : « homme, humanité ».
Par conséquent, le récit de la chute est allégorique, et concerne, non pas le premier homme hypothétique, mais l’humanité par nature.
Comment comprendre le péché originel ? Il est évident que chaque être humain qui naît n’est pas personnellement coupable (malgré les tendances augustiniennes, sublimées dans le luthérianisme et le jansénisme) d’un fait passé. Non. Mais en revanche, pèse sur lui le poids de nombreux crimes, commis par ses ancêtres, ses semblables. Je crois qu’après les horreurs du XXème s., nous en avons une vue assez précise… Ce poids constitue, en outre, une tentation permanente : retomber dans les erreurs passées. Choisir la voie de la facilité, qui est, c’est logique, celle de la destruction. S’affranchir du péché originel, c’est surmonter la somme de ces pesanteurs et rejeter la notion de déterminisme à laquelle l’être humain tend, par facilité, lorsqu’il veut nier son libre-arbitre et réduire sa responsabilité morale. Cf le système de défense des exécutants en régime totalitaire :
c’était les ordres…
Citation:
Si un être supérieur est à l'origine de l'univers, il est un tout, une conscience globale au-delà du temps et des distances. Quelque chose d'inimaginable.
C’est tout le problème de l’analogie ou de l’univocité de l’être, tel qu’il a été débattu à la grande époque de la Scolastique. Thomas d’Aquin défendait la thèse de l’analogie de l’être, Jean Duns Scot, celle de l’univocité. Les deux étaient d’accord pour reconnaître que l’esprit humain peut non seulement avoir une idée de Dieu, mais que cette idée de Dieu n’est pas a priori (idée innée), mais provient d’un raisonnement a posteriori (par l’observation de l’univers), consacrant ainsi l’empirisme.
Evidemment, l’homme ne peut avoir une compréhension de tout l’être de Dieu. Mais il peut en avoir une compréhension, au moins partielle. Dieu n’est donc pas entièrement inimaginable.
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C'est cette arrogance qui caractérise les extrémistes religieux, persuadés qu'un Dieu rédempteur les "sauvera" eux seulement et punira le reste de l'humanité.
Mais il y a une autre arrogance : celle du monisme, qui peut aboutir à bien des extrémités.
S’il n’y a pas de Dieu créateur, alors le seul être est l’univers. C’est l’univers qui, logiquement, reçoit tous les attributs divins. Nous en faisons partie. Nous sommes donc tous une parcelle de la divinité. Par conséquent, le multiple est une illusion. Comme le dit la vieille phrase issue de la sagesse brahmanique : « tat tvam asi » : « toi aussi, tu es cela ». Toi = moi = l’univers. Par conséquent, rien ne m’empêche de tuer autrui, puisque autrui, c’est la même chose que moi, et que, pour que le suicide soit interdit, il le soit par quelqu'un d'autre que moi, ce qui n'existe pas...
Je ne dis pas que c'est le raisonnement classique du monisme acosmique, mais que c'est une possibilité de raisonnement parfaitement concevable.
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Copernic a démontré que la Terre n'était pas au centre de l'univers. Il a fallut des dizaines d'années pour que cette idée soit acceptée. Maintenant que nous savons que nous habitons un grain de poussière perdu dans l'espace, il faudrait se mettre dans le crâne que nous ne sommes rien ! Tout juste un accident dans l'Histoire de la Terre.
Hum… Le vertige des deux infinis, c’était à l’époque de Pascal. Premièrement, en toute rigueur, on ne peut pas dire que nous ne sommes rien.
Ensuite, « accident » de l’histoire de la Terre… Non, précisément l’inverse ! L’être humain est l’organisme le plus complexe, le plus organisé, pour l’instant, de l’histoire terrestre… Je ne vois pas trop en quoi c’est un accident.
La notion d’accident ne serait compréhensible que si tout était le résultat du hasard. Mais comme on l’a dit ailleurs, l’explication par le hasard est de moins en moins intelligible. Quelle que soit la nature de ce
Logos, de cette loi générale de complexification immanente à la nature, qui organise la matière, on ne peut pas dire que l’apparition de chaque étage de la pyramide de la complexité soit un accident, mais plutôt une étape.
Je m’aperçois que ce post est d’une longueur invraisemblable, j’arrête donc ici. Permettez-moi de m’en excuser
Amicalement,
Logos