Wemerien a écrit:
Nous mourons parce que l'évolution ne nous a pas naturellement amenés vers l'immortalité : au premier âge de l'humanité, il était fréquent de mourir très jeune, de causes violentes ou de maladies alors incurables. La mort "de vieillesse" étant alors largement absente, nous n'avons pas développé de système qui nous permettrait de l'éviter. Si nous étions morts "de vieillesse" plus tôt, massivement, une sélection se serait opérée entre ceux qui vivent plus longtemps et les autres et notre espérance de vie serait actuellement élargie. Il n'y a aucune autre raison, qu'elle soit naturelle, spirituelle, ou même éthique. Mourir "de vieillesse", c'est aussi con que de mourir d'une crise cardiaque ou d'une grippe.
La "mort de vieillesse" est un mythe, elle n'existe pas. C'est juste une façon commode de ne pas se prendre la tête sur les raisons de la mort inéluctable et prévisible d'une personne âgée.
La vieillesse en elle-même ne tue pas, ce sont ses multiples conséquences qui provoquent la mort : affaiblissement du système immunitaire rendant plus vulnérables aux maladies, dysfonctionnements métaboliques, organisme usé et donc physiquement plus fragile d'où risque plus élevé de troubles du système respiratoire/cardiaque...
Wemerien a écrit:
La vieillesse n'est pas une fatalité, c'est une maladie. Toute maladie, lorsqu'elle se voit traitée de la bonne manière, peut être soignée.
Oui et non, les choses sont plus complexes que cela.
Le problème est que l'on ne sait pas réellement si "l'homme est un chaise ou une fleur" pour paraphraser le biologiste Jean Rostand. La chaise peut être rendue immortelle par des réparations successives ; la destruction finale de la fleur elle est "programmée", il est dans la nature de la fleur de mourir, pour la rendre immortelle il faut donc modifier son programme.
La biologie laisse plutôt penser que la mort de l'homme est programmée.
Un petit exemple, très célèbre : les cellules ne peuvent se reproduire par division qu'un certain nombre de fois. C'est ce qu'on appelle la limite de Hayflick : au bout de 52 divisions, la cellule rentre en sénescence et est détruite par l'organisme.
La limite de Hayflick trouve son origine dans des raisons génétiques : le raccourcissement des télomères, des portions d'ADN non codantes situées à l'extrémité des chromosomes et qui servent à les protéger. A chaque division cellulaire, les télomères se raccourcissent ; quand ils sont devenus trop courts au bout d'une cinquantaine de divisions, ils ne peuvent plus jouer leur rôle protecteur. L'ADN risque alors de se corrompre ou d'être altéré, la cellule stoppe donc sa croissance et est détruite...
La limite de Hayflick est un mal nécessaire, dans la mesure où elle permet de limiter l'évolution des cancers ; les cellules cancéreuses stoppent leur production de cellules malignes au bout d'un certain nombre de division et restent donc confinés dans l'organisme, sans produire de métastases. Un cancer devient réellement dangereux quand les cellules cancéreuses ne connaissent plus la limite de Hayflick et commencent à croître de façon anarchique.
La limite de Hayflick et le raccourcissement des télomères ne sont pas l'unique cause de la vieillesse : les mutations qui altèrent le génome originel, "propre" au moment de la fécondation, et la perte des capacités de synthèse cellulaire en sont d'autres.
La vieillesse est donc une fatalité... mais ce n'est pas pour autant qu'on ne peut pas l'empêcher, en modifiant à la base le "programme" responsable du vieillisement.
Si la médecine s'intéresse plutôt au traitement des conséquences de la vieillissement, il existe des projets (tels le monumental
projet SENS) qui eux s'intéressent aux causes intrinsèques de la vieillisse, et tentent d'y apporter des solutions. Par exemple, dans le cas de limite de Hayflick ci-dessus, la solution serait de modifier le programme génétique tel que la synthèse de la télomérase (enzyme responsable de la construction et de la réparation des télomères) soit constante dans le temps, de façon à ce que les télomères ne raccourcissent plus à chaque division.
Il faudrait également réinjecter dans l'organisme des cellules souches, ou réactiver celles en dormance dans l'organisme. Les cellules souches ne sont en effet pas soumises à la limite de Hayflick, en réinjecter permettrait de garantir les capacités de régénération de l'organisme et de lutter contre les cancers.