De nombreuses théories ont vu le jour concernant la mort de Kennedy.
Voici la dernière en date : Johnson a-t-il fait assassiner Kennedy? (L'Illustré; 22.10.2003; Page 34; Numéro 43).
Citation:
Johnson a-t-il fait assassiner Kennedy? Les révélations du dernier témoin.
Quarante ans après, on croyait avoir tout dit, tout vu, tout entendu sur l'un des assassinats les plus mystérieux de notre temps. Mais aujourd'hui, dans un livre explosif, un homme d'affaires texan parle enfin. Il accuse et désigne l'homme qui a commandité l'assassinat de JFK: le vice-président Lyndon B. Johnson lui-même! Interview-vérité.
Par Tom Bowden
Dallas, 22 novembre 1963. Le destin de John F. Kennedy s'interrompt brutalement sous les coups de feu. La version officielle du fameux rapport Warren, désignant Lee Harvey Oswald comme seul et unique assassin, n'a jamais vraiment convaincu les Américains. Depuis lors, le mystère JFK passionne. Mais aujourd'hui, quarante ans après, le mystère touche peut-être à sa fin. Dans un livre événement*, William Reymond, notre correspondant aux Etats-Unis, a enquêté trois ans au Texas autour des confessions de Billie Sol Estes. Homme d'affaires texan, Estes était un des soutiens financiers de Lyndon Johnson, le vice-président de Kennedy. Ses propos sont directs: non seulement il connaît les meurtriers du président, mais il détient les preuves de ses accusations. Rencontre-vérité avec le dernier témoin, qui arrive cette semaine en France pour la promotion du livre. Tom Bowden, le directeur du Conspiracy Museum de Dallas, au Texas, l'a rencontré chez lui, en exclusivité pour L'illustré.
- Billie Sol Estes, on célèbre le quarantième anniversaire de la mort de JFK le mois prochain, et c'est maintenant que vous vous décidez à parler. Un bien curieux hasard, non?
Quand j'ai accepté l'idée de faire un livre, c'était en 1999, et il n'était alors pas question de calendrier. William, qui a recueilli mes confidences, a travaillé de nombreuses années avec moi ici, au Texas. Le livre est prêt, il sort. Le reste n'est qu'accessoire.
- Vous n'êtes pas le premier à promettre des révélations sur l'assassinat de JFK. Pourquoi vous croire, vous?
D'abord parce que je tiens mes promesses. Et je vais jusqu'au bout de mes souvenirs. Même si certains m'impliquent dans de sordides affaires de meurtres. Et puis, surtout, JFK, le dernier témoin n'est pas un livre d'entretiens. Moi, j'ai raconté ce que je savais à William Reymond qui a enquêté pour prouver mes dires. C'est donc une véritable investigation.
- Une enquête qui se vend comme l'ouvrage définitif sur l'assassinat de JFK, cela ne vous paraît pas excessif?
Non, pourquoi? Le livre révèle l'identité d'un deuxième tireur et, surtout, remonte la trace des commanditaires du complot. Que vous faut-il de plus?
- Reprenons. A vous croire, les responsables de la mort de Kennedy sont les membres d'un réseau texan gravitant autour du vice-président Johnson...
N'allons pas trop vite. Les informations sont graves et il ne faut pas jouer avec cela à la légère. Pour comprendre mes révélations, il faut comprendre à quel monde j'appartenais en 1963.
- Justement, parlons-en...
A l'époque, j'étais immensément riche, mais à l'aube de ma chute. Mais, surtout, depuis le début des années 50 je soutenais financièrement Lyndon Johnson. Bientôt, j'allais tout perdre et me retrouver en prison.
- Comment devient-on le «sponsor» d'un candidat?
Dès 1948, Cliff Carter, le conseiller politique de Lyndon Johnson, a mis en place un réseau politique et financier autour de son candidat. Mon parcours était brillant, mon succès foudroyant. Carter est entré en contact avec moi et m'a proposé de devenir encore plus riche.
- Comment cela?
L'idée était de profiter de la présence de Johnson à Washington pour obtenir de nombreux contrats gouvernementaux. A condition d'en reverser ensuite une partie à la caisse noire de Lyndon.
- Il s'agit donc de corruption.
Il s'agissait surtout de graisser la machine et de s'assurer que les intérêts texans soient bien représentés à Washington. Lyndon était notre homme là-bas.
- Une partie du travail de William Reymond a été de prouver votre relation avec Lyndon Johnson. Pourquoi une telle nécessité?
Pour éviter de passer pour un menteur! Le clan Johnson a toujours tout fait pour me discréditer et prétendre que Lyndon ne me connaissait pas. William a réussi à retrouver 19 lettres que Johnson m'a envoyées. Il a rencontré des témoins, découvert mon numéro personnel à Washington dans la liste des communications téléphoniques. Tout cela est dans le livre, avec les documents.
- Etait-ce un moyen de renforcer vos accusations autour de l'assassinat de Dallas?
Bien sûr. Ma parole n'était pas suffisante. Il fallait trouver des preuves de tout cela. Même si, en fin de compte, je détenais la plus importante.
- Vous parlez d'enregistrements secrets?
Oui... Depuis 1960, afin de me protéger, j'avais fait installer un système enregistrant mes conversations téléphoniques et les entretiens dans mon bureau.
- Vous protéger contre qui?
C'est une longue histoire. Disons que le pouvoir texan n'a jamais hésité à éliminer le maillon faible. Et qu'il me fallait une assurance vie. Surtout lorsque Bobby Kennedy a commencé à s'intéresser à moi.
- Le frère du président, alors attorney general, s'est aussi intéressé personnellement à vous. Mais pourquoi?
Par ses services, Bobby avait appris ma participation au réseau de corruption déployé autour de Lyndon et il pensait qu'il serait en mesure de me faire craquer. Mais je n'ai jamais parlé et j'ai été condamné à quinze ans de prison. Surtout, Bobby préparait le second mandat de son frère à la présidence. Et, pour de nombreuses raisons, JFK et lui avaient décidé de se séparer de Lyndon Johnson. C'est comme cela que je me suis retrouvé au milieu de la guerre entre les deux clans.
- Pourquoi vous taire alors et parler aujourd'hui?
Si j'avais collaboré à l'époque, je n'aurais pas tenu dix minutes dehors. J'aurais été tué. Aujourd'hui, je vous l'ai dit, j'ai mon assurance vie, ma cassette avec Cliff Carter. Trente-six heures avant sa mort, en 1971, Cliff Carter, le plus intime conseiller de Johnson, m'a révélé les secrets de l'assassinat de Kennedy. Et je les ai enregistrés à son insu.
- Et que vous dit-il à ce moment-là?
C'est l'histoire très simple d'un homme et de ses soutiens qui, d'un coup, se rend compte qu'il va tout perdre. Pour la première fois depuis longtemps, le Texas allait perdre pied à Washington et il fallait agir vite. Le voyage du président Kennedy à Dallas était l'occasion idéale d'équilibrer la balance et d'avoir notre homme, Lyndon B. Johnson, à la Maison-Blanche.
- C'est ce que vous a dit clairement Cliff Carter à ce moment-là?
Oui. Carter regrettait sa participation à la préparation de l'assassinat. Il regrettait aussi que Johnson ait donné l'ordre de tuer le président. e
- Selon vous, un certain Malcolm Wallace était le deuxième tireur? Mais qui est-il?
Mac Wallace était le porte-flingue du réseau de Lyndon. Depuis 1951, il se débarrassait des ennemis de Lyndon. C'est un fait désormais établi. Il y a les déclarations de Cliff Carter qui le prouvent. Et puis, surtout, Wallace a laissé son empreinte sur un des cartons du dépôt de livres scolaires. Le 22 novembre 1963, il a tiré sur JFK depuis le cinquième étage. Là où se trouvait Lee Harvey Oswald. C'est la preuve ultime du complot.
- Pourquoi refusez-vous de rendre public cet enregistrement, quarante après?
Je le ferai un jour, lorsque les dernières personnes impliquées dans cette affaire seront mortes. Mais, pour la préparation de son livre, William Reymond a pu les entendre. Avant cela, c'est encore dangereux.
- Quarante ans après... Vous n'exagérez pas un peu?
L'assassinat de JFK est un fait divers texan. Un incident de parcours d'un réseau existant bien avant 1963 et bien présent encore aujourd'hui. Si vous comprenez bien cela, vous avez votre réponse.
- Avez-vous connu Lee Harvey Oswald et Jack Ruby? Etaient-ils eux aussi liés à la mafia texane de Johnson?
Je n'ai jamais rencontré Lee Harvey Oswald. Mais j'ai failli m'associer à l'époque avec Jack Ruby, et cela ne s'est pas fait. Je fréquentais son club lors de mes voyages à Dallas. Jack était un personnage central du Dallas hors la loi. La drogue, les armes, Jack n'ignorait rien. Dans une lettre écrite depuis sa prison peu avant sa mort, il reconnaît qu'il a tué Oswald pour l'empêcher de parler et avoue à demi-mot qu'il était aux ordres de «l'homme aux commandes à Washington»...
- Selon vous, la mort de Robert Kennedy, en 1968, est-elle liée à celle de son frère, cinq ans plus tôt?
C'est une question perspicace. Bobby voulait ouvrir à nouveau le dossier de l'assassinat de son frère. Et puis son arrivée à la Maison-Blanche était inconcevable. Alors, je dirai que c'est sans doute lié, pas pour les raisons que nous croyons, mais que, oui, l'assassinat de Robert Kennedy est probablement lié à celui de JFK.
- Aujourd'hui, quarante ans après, avez-vous des regrets?
Je ne regrette pas la prison, par exemple. Elle m'a permis de rencontrer Vito Genovese, le parrain des parrains. C'était un homme extraordinairement charismatique. Je regrette en revanche de n'avoir jamais parler avant, seulement pour protéger Johnson. Je le regrette parce qu'il m'a trahi et qu'il n'a pas tenu sa promesse de s'occuper de moi.
Propos recueillis par Tom Bowden J.
Pour en savoir plus : «JFK: le dernier témoin», par William Reymond et Billie Sol Estes, Ed. Flammarion.
Citation:
Le deuxième tireur: Malcolm Wallace.
Au 5e étage du Texas School Book Depository, Lee Harvey Oswald et Malcolm Wallace sont les deux tireurs identifiés à ce jour. Le premier sera arrêté quelques heures après le drame (et abattu à son tour par Jack Ruby qui avouera plus tard l'avoir tué pour l'empêcher de parler). Quant au second, on retrouvera une de ses empreintes digitales sur un carton du Texas School Book Depository. Une empreinte qui a enfin parlé, quarante ans après...
Billie Sol Estes (à gauche) au temps de sa splendeur. Il fut un des tout premiers hommes d'affaires du Texas à acquérir un avion privé pour ses déplacements.
Signé John Kennedy et Lyndon Johnson. Une des nombreuses preuves que Billie Sol Estes connaissait bien les deux hommes.