L'image de la dépouille de Jean Paul II a été offerte dimanche au monde entier, en direct sur les télévisions, pendant qu'une foule immense se recueillait place Saint-Pierre et que les hommages à l'homme de paix, décédé samedi soir, affluaient de toute la planète.

La dépouille de Jean Paul II repose dimanche 3 avril dans la salle Clémentine du Vatican [© AFP]
CITE DU VATICAN, 3 avr 2005 (AFP) - Allongé sur un catafalque recouvert d'un tissu de couleur bronze-or, Jean Paul II, le visage serein, était vêtu d'une chasuble blanche et d'une cape rouge, les mains repliées sur la poitrine et tenant sa crosse au creux du bras gauche. Sa tête coiffée d'une mitre blanche reposait sur plusieurs coussins.
Les membres de la Curie, des plus hautes autorités italiennes et du corps diplomatique ont été les premiers, dimanche matin, à s'incliner sur la dépouille qui reposait dans la salle Clémentine, au deuxième étage du palais apostolique situé sur la place Saint-Pierre du Vatican.
Le président italien Carlo Azeglio Ciampi, 84 ans, ami personnel du pape, a été le premier à se recueillir longuement.
Sur le parvis de la place, où la foule des fidèles avait appris la veille au soir le décès du pape, plus de 100.000 personnes s'étaient rassemblées dans la matinée pour assister, émues et recueillies, à la première messe d'après Jean Paul II, présidée par le cardinal Angelo Sodano, qui fut le secrétaire d'Etat du pape défunt.
Après le premier hommage officiel, le corps de Jean Paul II, mort à 84 ans après un pontificat de 26 ans, devait être transporté à la basilique Saint-Pierre, qui sera en principe sa dernière demeure, et où les fidèles pourront à leur tour lui rendre hommage à partir de lundi après-midi.
Rome, pendant ce temps, se préparait à accueillir pour les obsèques, prévues entre mercredi et vendredi, au moins deux millions de fidèles du monde entier, outre des dizaines de chefs d'Etat et de gouvernement et de nombreuses têtes couronnées.
Un "défi extraordinaire" à relever en matière de logistique et de sécurité, a souligné le maire de la capitale italienne Walter Veltroni, alors que le dispositif de sécurité de plusieurs milliers de personnes, forces de l'ordre et personnel médical, déjà mis en place dimanche a constitué un premier test.
Une première congrégation des cardinaux doit se réunir lundi matin pour décider du jour exact des obsèques, alors que la période des funérailles dure au total neuf jours.
Puis, entre le 18 et le 23 avril, se réunira en conclave le collège de 117 cardinaux chargés d'élire le successeur de Jean Paul II, tandis que la gestion des affaires courantes de l'Eglise est assurée dans l'intervalle par le cardinal carmerlingue Eduardo Martinez Somalo, sorte de pape "par intérim".
A l'issue de la messe, l'archevêque Leonardo Sandri a lu un message posthume de Jean Paul II, préparé pour la fête de la Miséricorde divine, célébrée ce dimanche et qu'il avait lui-même créée. Karol Wojtyla y affirme que "l'amour convertit les coeurs et donne la paix".
Chef spirituel de plus d'un milliard de catholiques, le pape, qui aurait eu 85 ans le 18 mai, est mort samedi à 21h37 (19h37 GMT), dans son appartement privé du Vatican, où il avait souhaité vivre ses derniers instants.
Le certificat de décès, signé par son médecin personnel, Renato Buzzonetti, précise que Jean Paul II est mort d'un "choc septique et d'une insuffisance cardiaque irréversible". Le certificat ajoute que le pape souffrait de nombreux problèmes de santé, dont "la maladie de Parkinson".
Il s'est éteint en tenant la main de son secrétaire particulier, l'archevêque polonais Stanislaw Dziwisz, pendant que sur la place Saint-Pierre, la foule priait et chantait. Selon la presse italienne, son dernier mot aurait été "Amen".
Les condoléances et les hommages ont afflué du monde entier. Du secrétaire général de l'Onu, Kofi Annan, qui a salué l'"infatigable avocat de la paix", au président français, Jacques Chirac, de la reine Elizabeth II d'Angleterre au président américain George W. Bush, en passant par son homologue russe Vladimir Poutine.
Le Brésil, plus grand pays catholique du monde, a décrété sept jours de deuil officiel, tandis que l'Egypte, pays musulman, observera trois jours de deuil. L'Italie, imitée par Cuba, la Bolivie et l'Inde, a déclaré trois jours de deuil national.
Le choc était évidemment très grand en Pologne, où des millions de catholiques priaient pour le repos de Jean Paul II et où le deuil durera jusqu'aux funérailles.
A Wadowice, la petite ville proche de Cracovie où est né Karol Vojtyla, le 18 mai 1920, comme partout en Pologne, des dizaines de milliers de fidèles se sont massés dans les églises.
"La Pologne et les Polonais ont une dette particulière envers Jean Paul II. Il n'y aurait pas eu de Pologne libre sans un pape polonais", a affirmé le président polonais Aleksander Kwasniewski, allusion au rôle de Jean Paul II dans la chute du communisme.
L'Eglise orthodoxe russe, qui a entretenu des relations difficiles avec le pape, a salué la mémoire de Jean Paul II, tandis que l'Eglise catholique officielle chinoise, qui n'entretient pas de relations avec le Vatican, a présenté ses "profondes condoléances".
Après deux hospitalisations successives et une trachéotomie en février, l'état de santé de Jean Paul II s'était brusquement aggravé jeudi, mais il avait souhaité ne pas être hospitalisé une dernière fois.
Privé de la parole depuis sa trachéotomie, le pape le plus médiatique de l'histoire s'était néanmoins montré à quelques reprises à la fenêtre de sa chambre d'hôpital, des images de souffrance qui avaient soulevé une controverse au sein de l'église.
Premier pape slave de l'histoire de la chrétienté, premier pape non italien depuis 455 ans, Karol Wojtyla, élu chef de l'Eglise à 58 ans, le 16 octobre 1978, s'était imposé comme un chef spirituel doublé d'un homme d'action.
Polyglotte et inlassable pèlerin, il aura attiré des foules considérables à chacun de ses déplacements - 104 voyages à l'étranger et 129 pays visités.
Mais ce pontificat aura aussi été marqué par les multiples problèmes de santé de cet homme, autrefois grand sportif, affaibli par la maladie de Parkinson et par les séquelles des blessures reçues lors de l'attentat de l'extrémiste turc Mehmet Ali Agca, le 13 mai 1981 sur la place Saint-Pierre, d'un cancer à l'intestin et de deux fractures, une à l'épaule et une au fémur.
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