Le Dr Frédéric Chaussoy explique comment il a jugé que son "devoir de médecin" était d'aider le jeune Vincent Humbert à mourir comme il le réclamait, dans un livre-confession dont l'hebdomadaire Mariane à paraître samedi publie les bonnes feuilles.
Après avoir débranché la machine qui aidait le jeune tétraplégique à respirer, celui-ci se met à haleter. "Il ne parvient ni à respirer ni à cesser de respirer", écrit le médecin qui dirige le service de réanimation du centre héliomarin de Berck-sur-Mer (Pas-de-Calais).
Plutôt que de le laisser "s'étouffer peu à peu", ce qui peut prendre "des dizaines de minutes", il décide de "l'aider", ce 26 septembre 2003, deux jours après l'admission en réanimation de Vincent Humbert, plongé dans un coma profond par sa mère, Marie Humbert, qui lui avait injecté une dose de barbituriques.
"Vincent est mort. C'est ce qu'il voulait. Je l'ai juste aidé à quitter sa prison. Et j'espère que ça ne va pas m'y envoyer, moi. A perpétuité...", ajoute le Dr Chaussoy, 52 ans, qui a été mis en examen pour "empoisonnement avec préméditation", un crime passible de la réclusion à perpétuité.
"Je ne suis pas un assassin", affirme-t-il dès le titre de l'ouvrage (Oh! Editions) préfacé par l'ancien ministre de la Santé Bernard Kouchner et qui doit paraître le 15 novembre.
Dans un récent rapport, des experts en réanimation mandatés par la justice, ont, selon Me Antoine Duport, avocat du Dr Chaussoy, notamment estimé que l'injection létale qui a provoqué la mort de Vincent Humbert "était la moins mauvaise solution compte tenu de l'état de souffrance dans lequel se trouvait Vincent".
La législation actuelle, qui vise notamment dans le cadre de soins palliatifs à soulager la douleur de malades en fin de vie, "laisse sans solution les 20% de malades dont la douleur résiste à tout traitement" et elle "refuse de prendre en compte tous les malades qui sont en souffrance mais pas en fin de vie", relève le Dr Chaussoy.
"Dans l'affaire Humbert, l'obstination de la loi -qui interdit absolument à quiconque de tuer quiconque- s'oppose à la raison de Vincent et sa mère, qui ne voient pas comment continuer cette vie-là", écrit-il encore, posant aussi la question de la définition de la mort.
"Nous ne savons pas toujours ramener à la vie mais, si le cerveau est bien irrigué et que le coeur ne lâche pas, nous savons repousser la mort, presque indéfiniment", note-il.
"La seule mort contre laquelle nous ne pouvons vraiment rien est cérébrale: lorsque le cerveau ne fonctionne plus, nous ne savons pas le remettre en marche. Mais nous savons soutenir un coeur pour qu'il ne cesse pas de battre. Un long moment. Et avec la respiration artificielle, nous savons retenir le dernier soupir d'un homme. Pendant des mois..."
_________________ "Le bonheur et la souffrance dépendent de votre esprit, de votre interprétation. Ils ne viennent pas d'autrui, ni de l'extérieur. Tous les bonheurs, toutes les souffrances ne dépendent que de vous, ils sont créés par votre esprit." Lama Zopa Rinpoche
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