Citation:
Des fusées de demain avec du soleil dans le moteur.
PARIS (AFP) - 05.02.03. Source prometteuse d'énergie, gratuite, inépuisable et sans combustion, le soleil pourrait devenir la solution de demain pour la propulsion des engins spatiaux, mais les techniques d'aujourd'hui ne permettent d'envisager son utilisation que dans plusieurs décennies.
La propulsion solaire thermique, qui a fait l'objet d'un séminaire, lundi et mardi au siège du Centre national d'études spatiales (CNES), à Paris, part d'un principe simple, que connaît tout enfant qui s'est amusé un jour à enflammer du papier en l'exposant aux rayons du soleil concentrés par une loupe. La technique de l'héliothermie consiste à exploiter de cette manière l'énergie tirée du soleil, à une échelle bien différente.
A cette fin, il faut doter le véhicule spatial d'un ou souvent de deux grands réflecteurs (miroirs), qui focalisent les rayons en un point où cette énergie se transforme en une forte source de chaleur (de l'ordre de 2.000 degrés Celsius). Cette chaleur sert à chauffer un fluide (généralement de l'hydrogène liquide) et à générer des gaz qui, éjectés à forte vitesse par une tuyère, créent l'effet propulsif.
La poussée obtenue, ont rappelé les experts, est insuffisante pour faire décoller une fusée du sol. Dans cette phase, la propulsion chimique conventionnelle reste indispensable. En revanche, pour des engins déjà en orbite (étages supérieurs de fusées, satellites, sondes interplanétaires...), cette technique présente "un potentiel très important", a souligné Michel Eymard, du CNES.
Parmi les principales applications envisagées, le transfert de satellites géostationnaires (36.000 km au-dessus de l'équateur) à partir d'une orbite de 350 à 1.500 km. Français, Américains, Russes y réfléchissent depuis des années, mais personne n'est pour l'instant parvenu à résoudre les problèmes techniques de base.
"Malgré plusieurs annonces, aucun système n'a volé à ce jour", a rappelé Nicolas Bérend (ONERA), en évoquant plusieurs projets américains, dont le démonstrateur SSE (Shooting Star Experiment), qui devait être expérimenté lors d'une mission de navette en 2000, ou le SOTV (Solar Orbit Transfert Vehicle), que son concepteur prévoit toujours, sur son site Internet, pour... 2001. Un autre projet, STOTS (Solar Thermal Orbit Transfer System), destiné à aboutir à des "propositions concrètes", est à l'étude en Europe, a signalé Denis Estublier (ESA).
Selon les participants, le plus mûr des projets semble être le SPPS (Solar Power-Propulsion System), du Centre de recherche russe Keldych, qui pourrait voler prochainement.
Plus que de la propulsion elle-même, les problèmes viennent des dispositifs annexes, notamment des miroirs qui, en fonction des besoins d'alimentation en énergie, doivent mesurer plusieurs dizaines voire centaines de mètres carrés. Pour pouvoir les amener en orbite, la seule solution actuellement envisageable est le réflecteur gonflable. "On n'est pas près d'en voir un, même si c'est l'avenir à long terme", a noté Daniel Hernandez (CNES).
Mais, comme l'a conclu Raymond Bec (CNES), organisateur du séminaire, l'objectif actuel n'est que d'élaborer, d'ici à 2010, des actions et recommandations et tracer les voies vers la réalisation de systèmes opérationnels, vers 2050. Seul point faible des débats, qui ont eu lieu à l'initiative d'un groupe de réflexion mis en place en 2001 : aucune estimation des coûts. "On ne peut pas présenter un dossier sans avoir un paragraphe à ce sujet", a-t-il relevé.