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NASA - Mission Gravity Probe B
Einstein avait raison : le temps et l’espace se déforment
Canoë d'après The Observer
15/04/2007 17h52 - Mise à jour 15/04/2007 18h51
NASA - Mission Gravity Probe B - Einstein avait raison : le temps et l’espace se déforment
Plus de quatre-vingt dix années après la publication de la célèbre théorie de la relativité générale d'Albert Einstein, un engin de 700 millions de $ de la NASA a prouvé que l’univers se comporte exactement comme l’avait prédit ce pionnier de la physique, né allemand et mort suisse-américain. La course est maintenant lancée pour démontrer la validité de l’autre «moitié» de la relativité.
Sous son nom dans le Oxford English Dictionary se trouve la simple définition: génie. Pourtant, depuis des décennies, certains physiciens se demandent en fait: «Et si Albert Einstein s’était trompé?» Un demi-siècle et sept annulations plus tard, une mission d'un budget global de plus de 700M$ visant à valider la théorie du savant sur l’univers en a finalement confirmé la véracité – ou à tout le moins démontré avec grande précision l’exactitude d’un de ses effets spécifiques.
Les résultats préliminaires de Gravity Probe B, un des satellites les plus complexes de la NASA, a confirmé hier - «à un degré de précision dont la marge d’erreur est de moins d’un pour cent» - le postulat fait il y a plus de 90 ans par Einstein, à savoir qu’un objet comme la Terre déforme effectivement le tissu de l’espace-temps.
Ce phénomène, appelé «effet de précession géodésique», est le premier de deux effets prédits par la théorie que visait à mettre à l’épreuve la mission. L’autre est appelé «effet Lense-Thirring» (frame-dragging en anglais), soit le phénomène par lequel la Terre «entraîne» l'espace-temps en tournant sur elle-même.
Francis Everitt, ce professeur de l’Université Stanford qui a dédié sa vie à investiguer la théorie de la relativité d’Einstein, a déclaré à des chercheurs présents à l’American Physical Society qu’il faudra encore huit mois pour mesurer avec précision l’effet d’entraînement.
«En comprendre les détails évoque le processus d’une fouille archéologique», a dit William Bencze, directeur de mission. «Un chercheur débute avec un bulldozer, poursuit avec la pelle, puis termine avec des cure-dents et des brosses à dents pour dégager la poussière. Nous en sommes à distribuer les brosses à dents.»
Le projet du satellite Gravity Probe B a été imaginé dans les années 1950, mais a souffert des décennies de reports tandis que d’autres chercheurs effectuaient des recherches qui corroboraient la thèse d’Einstein. C’est l’entêtement de M. Everitt qui empêcha le projet de tomber complètement à l’eau. La mission conjointe de la NASA et de l’Université Stanford utilise quatre sphères des plus parfaites – des gyroscopes ultra précis – pour détecter d’infimes distorsions dans le tissu de l’espace-temps de l’univers.
L’objectif de M. Everitt était de déterminer avec le plus haut degré de précision jamais atteint si Einstein avait raison dans sa façon de décrire les origines de la gravité et son influence sur l’univers.
Selon Einstein, de la même façon qu’une grosse boule placée sur une pièce de tissu élastique en étire le matériau en créant une dépression sur sa surface, les planètes et les étoiles déforment elles aussi l’espace-temps. Une bille se déplaçant le long du tissu sera attirée par la boule, comme la Terre l’est vers le Soleil, mais elle ne tombera pas dessus tant qu’elle se déplace avec une vitesse suffisante. La gravité, avança alors Einstein, n’est donc pas une force d’attraction directe entre les corps, tel qu’établi auparavant.
Peu de scientifiques attendent toutefois les résultats finaux de la mission - qui seront révélés en décembre - pour se convaincre du génie d’Einstein. «Des aspects les plus ésotériques de la dilatation du temps jusqu’à la simple et magnifique équation, e=mc2, la plupart des idées d’Einstein sur l’univers résistent à l’usure du temps et au scepticisme», a dit Robert Massey, de la Société astronomique royale britannique.
Le chercheur estime toutefois que la mission avait un caractère scientifique légitime en ce sens qu’elle cherchait à mettre à l’épreuve une théorie afin d’en confirmer le génie, mais d’autres ont sévèrement critiqué les coûts et la durée de l’étude, déplorant que ce qui vient d’être annoncé a déjà été démontré. Sir Martin Rees, Astronome royal, a dit que l’annonce «ne jettera aucune nouvelle lumière sur la théorie.»
LA THÉORIE
Lorsque Einstein publia sa théorie générale de la relativité en 1915, il proposa une nouvelle façon de décrire la gravité. Ce n’était pas une force, comme l’avait supposé Sir Isaac Newton, mais plutôt une conséquence de la déformation de l’espace et du temps, combinés dans sa théorie sous l’appellation «espace-temps». Tout objet déforme le tissu de l’espace-temps et plus cet objet est massif, plus l’effet qu’il produit est important.
Les planètes n’orbitent donc pas autour du Soleil parce qu’elles sont attirées par l’astre; elles suivent plutôt la courbe de l’espace-temps tel que déformé par le Soleil. Les planètes ne «tombent» jamais vers le Soleil en raison de leur vélocité.
Selon la théorie, matière et énergie déforment l’espace-temps, l’entraînant dans leur mouvement. L’effet d’entraînement se produit théoriquement lorsque la rotation d’un corps volumineux «tord» à sa suite le temps et l’espace environnants. C’est le second effet prévu par la théorie d’Einstein que la mission de la NASA cherche à démontrer avec le plus haut degré de précision jamais atteint.