fred'x a écrit:
En fait ce n'est pas tellement du scepticisme, le sceptique refuse de croire tant qu'on ne lui a pas prouvé explicitement (et encore) que ce qu'il a vu est réel.
Qu'on me pardonne de m'acharner à maintenir ce topic en vie, mais je trouve qu'on y soulève des questions ma foi fort intéressantes.
Par exemple, Fred'x l'a encore fait.
Il a même fait mieux que ça, puisque sa remarque touche à non pas un, mais deux problèmes centraux du paranormal en général.

Le premier concerne la perception du scepticisme. La définition que tu en donnes, cher Fred'x, est à la fois erronée et exacte.
Elle est exacte dans la mesure où c'est là la définition qu'en ont la plupart des gens qui s'intéressent au paranormal. Il y a encore quelques années de cela, c'est d'ailleurs une opinion que je partageais.
Mais elle est erronée dans la mesure où elle ne correspond pas (ou mal) à la réalité.
Il me semble en avoir déjà parlé sur un autre topic (si j'avais su qu'à 26 ans je commencerai à radoter...

), mais étymologiquement le sceptique est celui qui "considère" ou "examine", et non celui qui rejette en bloc avec a priori et mauvaise foi, comme le suggère fréquemment la définition admise par le plus grand nombre. Le passage "
le sceptique refuse de croire tant qu'on ne lui a pas prouvé explicitement (et encore) " (que je considère ici comme le reflet de l'opinion générale, n'y voit donc pas une attaque personnelle fred'x

) est à cet égard particulièrement significatif. Pour beaucoup le scepticisme consiste donc à rejeter toute allégation de paranormal avec une rigidité bornée.
En réalité, le sceptique (au sens étymologique du terme donc) se contente d'examiner les faits allégués, les preuves présentées et les opinions soutenues avec une rigueur méthodologique qui passe à tort pour de la rigidité intellectuelle. Il s'efforce (ou plus précisément devrait s'efforcer, car certains y parviennent mieux que d'autres) de rester objectif et ouvert, quitte à faire sien l'improbable s'il s'impose à l'enquêteur rigoureux (la formule n'est pas de moi mais du biologiste français Pascal Tassy).
Alors pourquoi est-ce que la première définition (celle que tu cites, Fred'x) a-t-elle supplanté celle qui est à mon avis la bonne ? J'y vois quatre raisons principales :
1. Il y a souvent confusion sémantique entre "sceptique" et "dubitatif". Car le sceptique doute a priori (le seul a priori qu'il peut raisonnablement se permettre), au sens où il rejette toute hypothèse préalable à l'examen des preuves. Le contraire serait d'ailleurs une faute méthodologique, car l'enquêteur risquerait, consciemment ou non, de déformer les faits ou de biaiser ses interprétations pour les rendre conformes à sa théorie. C'est ce que l'on nomme un "raisonnement circulaire".
2. Certains se sont parés et se parent encore des vertus du scepticisme pour appuyer des opinions scientistes ou rationalistes parfois extrêmes, du style "le paranormal c'est des foutaises qui ne méritent même pas qu'on s'y intéresse". Ce faisant, ils se livrent parfois à de splendides raisonnements circulaires. Et ils discréditent fortement ceux qui cherchent à étudier le paranormal objectivement en s'appuyant sur la méthode sceptique.
3. D'autre extrémistes, ceux du bord opposé qui voient donc des "fantômes extraterrestres possédés par des poltergeists télépathes" (comme tu l'as si joliment dit fred'x

) partout, ont opportunément pris l'habitude d'assimiler tous les sceptiques aux rationalistes les plus radicaux, assimilation fort pratique puisqu'elle leur permet de rejeter en bloc l'argumentation des sceptiques sans avoir à y répondre. Inutile de préciser que ces personnes sont tout autant adeptes du raisonnement circulaire que les précédentes.
4. Et enfin (et peut-être aussi surtout) le traitement réservé généralement au paranormal par les médias (essentiellement télévisuels), le plus souvent sous forme soit de documentaires à sens unique (tant "pro" que "anti"), soit de débats où, pour obtenir un cocktail explosif propre à faire grimper l'audience, on prendra grand soin de n'inviter que des extrémistes des deux bords. Il est bien évident que vu sous cet angle, le scepticisme (représenté par de doctes savants imbus de leurs titres, de leurs certitudes et surtout de leurs convictions) ne peut qu'avoir mauvaise presse aux yeux du public.
(bon là je commence à fatiguer. Il faut que je fasse une pause, donc je vais scinder mon post en deux parties

)