la chambre bleue a écrit:
Pour les Rongorongo (je viens d'apprendre dernièrement qu'il n'y a pas de trait d'union, en fait), la ressemblance avec une écriture ancienne chinoise est une éventualité soulevée par de nombreux chercheurs.
En fait, c'est une thèse qui n'est soutenue que par L. Bettocchi. Je ne sais pas si on peut encore parler "d'éventualité" vu la marginalité de cette théorie parmi les linguistes.
la chambre bleue a écrit:
C'est une thèse soutenue par Lorenna Bottecchi qui est vraiment très en avance sur cette question. le seul souci, c'est qu'elle part dés le début de sa thèse sur un postulat qui n'indique que la source orientale pour cette écriture pascuanne. Dommage.
Dommage, et surtout très discutable. J'ai jeté un oeil rapide au site de L. Bettocchi, les preuves qu'elle avance en faveur d'une origine chinoise des rongo-rongo sont très faibles : juste des similitudes entre les rongo-rongo et certains proto-sinogrammes des premières dynasties chinoises...
Or, rien ne ressemble plus à des idéogrammes que d'autres idéogrammes ; on peut voir des ressemblances troublantes entre les rongo-rongo et le script de l'Indus, le script Dongba (dont je parlais ci-dessus), les caractères du disque de Phaïstos... voir même avec certaines écritures syllabique comme le linéaire B (qui lui est mycénien).
En outre, à l'époque où les rapa-nuis ont débarqué sur l'île de Pâques (c'est-à-dire au XIIIème siècle environ), cela faisait déjà bien longtemps que l'écriture chinoise s'était développée -en fait, en dehors de quelques légères modifications, elle était presque entièrement similaire à l'écriture chinoise actuelle.
Comment expliquer dans ce cas que les Pascuans aient écrit dans une sorte de proto-chinois qui leur était postérieur de 1400 ans ? Comment se fait-il, si les rongo-rongo descendent du proto-chinois, qu'il n'y ait aucune continuité visible (on aurait dû logiquement en trouver des traces d'écritures dans les autres îles polynésiennes, dont celles dont proviennent les rapa-nuis) ?...
la chambre bleue a écrit:
Par contre, il est évident qu'il y a certainement une influence qui pourrait être, selon une personnalité belge rencontrée sur l'île (mais anonyme, hélas) une influence occidentale précédent l'arrivée de Roggeveen qui serait loin d'être le premier européen débarqué (d'ailleurs, à ce niveau, on connait la stupéfaction des premiers découvreurs hollandais et surtout espagnols de découvrir des blancs au sein de la population pascuane du XVIIIème siécle).
Les pascuans avaient apparemment une très grande variabilité d'aspect, sachant que Roggeveen décrit des gens à la peau claire côtoyant d'autres avec une peau foncée. Ce n'est pas forcément le signe d'un métissage, ce genre d'hétérogénéité phénotypique peut se concevoir comme une sorte de particularisme insulaire.
En outre, il ne faut pas oublier non-plus que la population rapa-nui était fortement hiérarchisée : Roggeveen nota bien les gens à la peau blanche faisaient parti de la classe supérieure, tandis que ceux à la peau sombre étaient les paysans et les artisans. Petit détail que certains partisans d'un colonisation non-polynésienne de l'île ont tendance à oublier...
Quand aux espagnols de l'expédition de González de Haedo qui ont remarqué des "blancs" au milieu de la population pascuane... L'explication est simple : il y a fort à parier que les matelots de Roggeveen n'ont pas su se retenir après plusieurs années de voyage, sans une seule femme à bord.
la chambre bleue a écrit:
L'origine entièrement polynésienne des pascuans ou "rapa-nui" (rien que le nom est une hérésie, et en fait et elle gène pas mal de pascuans) est très litigieuse car si vous étudiez de très près l'histoire moderne de l'île, vous vous apercevrez que la population a très nettement baissé entre 1862 et 1880 et que dés lors un apport polynésien fut considérable proportionnellement (on sait que Eyraud, Roussel, puis Dutrout-Bornier ont amené plusieurs dizaine de tahitiens pour une population locale qui dépassait avec peine la centaine d'habitants).
Certes. Mais les généticiens qui ont réalisé l'étude ont bien pensé à prendre ce métissage ultérieur en compte (il ne faudrait pas les prendre pour des imbéciles non plus

).
Ils ont réussi à montrer que les caractères européens ou sud-américains présents dans le pool génétique des pascuans actuels résultaient probablement d'un apport moderne. Derrière lui on distingue un fond plus ancien, qui est très clairement polynésien (tahitien et pascuan).
Donc
a priori, pas d'origine sud-américaine pour les pascuans.
Pour plus de détail, c'est
par là.
la chambre bleue a écrit:
Quant aux fouilles qui résultèrent de l'analyse ADN des squelettes pour en connaitre l'origine, elle est un peu légère : les morceaux d'os prélévés et analysés proviennent de squelettes postérieurs à 1890, voire 1930 !
Je ne crois pas, non. D'après l'anthologie de Van Tilburg consacré à l'île de Pâques, les squelettes remontaient apparement à la fin du XVIIème siècle.
la chambre bleue a écrit:
Quant à la langue rapanui, elle a été créée de toute pièce par les prètres polynésiens qui officièrent sur l'île et acculturèrent complètement les habitants. D'ailleurs si certains mots rapa-nui sont typiquement polynésien comme maururu (merci), tane (homme), vahiné (femme), ito (ouvrier), les noms de lieux comme Vinapu, Tongariki ou les termes Moai, kava kava n'ont aucune équivalence en polynésien... Seul Ahu (motte de terre) semble émerger (équivalent en Maori) mais cela n'explique rien la non signification du reste.
Je n'ai jamais dit le contraire en ce qui concerne la langue rapa-nui moderne.
Mais les linguistes disposent heureusement de documents anciens (chants, tentatives de conversations), antérieurs à la colonisation du XIXème siècle, témoignant de la langue originelle des rapa-nuis. C'est ce qui leur permet d'affirmer que cette langue appartenait très clairement à la famille du polynésien oriental.
la chambre bleue a écrit:
D'ailleurs, je n'ai jamais nié que les Polynésiens avaient abordé l'île de Pâques, mais ils ne furent pas les premiers et leurs "apports" fut certainement secondaires...
Des preuves ! Des preuves ! Tout milite dans le sens contraire.
la chambre bleue a écrit:
Ce qu'une patate douce ou une noix de coco peut faire, un ou plusieurs marins améridiens sur un radeau peut le faire aussi (c'est la thèse de Thor Heyerdahl)
Par contre dans le sens d'une expansion polynésienne vers l'est, il n'y a aucune trace d'eux sur les Galapagos ou l'archipel de Robinson-Crusoé, alors qu'on y a relevé une seule certitude : le passage des amérindiens qui, eux, navigaient vers l'ouest...
Les îles Galapagos sont nettement plus au nord que les îles polynésiennes (elles sont grosso-modo situées au niveau de l'équateur), et elles sont situées à une sacré distance de l'île de Pâques (3000 km). Il n'y a pas de raison pour que les rapa-nuis aient poussé leur exploration jusqu'à elles.
Idem pour l'île Robinson Crusoe, qui sont elles aussi à une bonne distance de l'île de Pâques (2500 km). Je n'ai en outre jamais entendu parler de vestiges amérindiens sur cette île, qui était inhabitée quand les premiers européens la découvrirent.
Il ne faut pas oublier que la colonisation de nouvelles îles par les polynésiens avait un caractère très hasardeux. Il ne faut pas s'imaginer que parce que les polynésiens étaient de bons marins, ils colonisaient
obligatoirement toutes les îles situées dans un périmètre de moins de 2000 km aux alentours de leur point de départ.
L'arrivée des premiers rapa-nuis sur l'île de Pâques, en provenance des îles Marquises, tient presque du miracle vu la distance qu'ils ont parcourus. Pour une réussite, combien d'expéditions parties des Marquises ont disparues avant d'arriver à poser un pied à terre ?...
la chambre bleu a écrit:
Rien n'empèche cependant qu'une catastrophe climatique puisse avoir fait disparaitre ces fameux arbres. J'ai pu constaté personnellement que cette famille de plantes est extèmement sensible aux variations climatiques et surtout au froid !
Par curiosité, comment l'as-tu constaté ?...
Et de toute façon, non, un simple catastrophe climatique n'est pas suffisante pour faire disparaître simultanément plusieurs espèces végétales.
Il est évident que la population pascuane, vraisemblablement trop nombreuse, a eu un fort impact sur l'environnement de l'île... Aucun archéologue ou historien de l'île ne le remet plus en question.
La question est de savoir si à cette pression anthropique s'est rajouté éventuellement un facteur climatique, qui aurait joué un rôle de "catalyseur" en portant le coup final à une population d'arbres déjà mal en point.