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La première greffée partielle du visage heureuse du résultat
LYON (AFP) - La femme de 38 ans qui a bénéficié dimanche de la première greffe partielle de visage au monde, a remercié l'équipe médicale après avoir vu le résultat de l'intervention et "se porte bien" même s'il faudra plusieurs mois pour mesurer le succès de l'opération.
"La patiente a vu son visage lundi matin et elle nous a remerciés", a raconté vendredi à Lyon le chirurgien qui a réalisé l'opération au CHU d'Amiens, le Pr Bernard Devauchelle.
"Le bénéfice est déjà net, elle mange, elle boit, elle parle clairement", a indiqué le Pr Devauchelle, ajoutant: "avant la greffe, elle n'avait plus de lèvres et sans lèvres c'est très difficile de respirer, de boire et de manger".
"La patiente a récupéré sa mobilité d'entraînement et sa mobilité musculaire, mais il faudra quatre à six mois pour qu'elle retrouve sa sensibilité", a poursuivi le spécialiste de chirurgie maxillo-faciale.
"La malade va bien ce matin sur le plan physique, immunologique et psychologique", a renchéri le Pr Jean-Michel Dubernard, lors d'une conférence de presse à l'hôpital Edouard Herriot de Lyon, où il suit l'évolution de la greffée, gravement défigurée en mai par une morsure de chien.
"On a eu une très bonne surprise en terme de couleur de la peau", a affirmé le Pr Devauchelle: "on a été stupéfaits de l'intégration du transplant dans le visage de la patiente".
Selon lui, des témoins ont pensé que la patiente avait une simple plaie au visage, sans réaliser qu'elle venait de subir une transplantation du nez, des lèvres et du menton.
Soulignant que la forme du visage dépend autant des tissus qui ont dû être greffés que du squelette qui les soutient et des expressions produites par les muscles, les médecins ont indiqué qu'il y avait une ressemblance "troublante" entre le visage de la patiente avant la blessure et celui qu'elle a désormais.
Mais la greffe opérée alors que les troubles d'élocution et d'alimentation de la patiente s'aggravaient, a un objectif fonctionnel autant qu'esthétique.
"On n'a pas encore la réponse sur la réinervation du bas du visage", or la repousse des nerfs est essentielle pour retrouver la sensibilité et toute la mobilité du visage, a reconnu le Pr Dubernard.
Il faudra selon lui "plusieurs mois" pour être fixé sur la réussite fonctionnelle comme sur les conséquences psychologiques de la greffe.
En outre, bien que le degré de compatibilité entre la donneuse et la receveuse soit inespéré (5e degré sur une échelle de 6), les risques de rejet demeurent élevés, surtout pendant les trois premiers mois, a rappelé le Pr Dubernard.
"En cas d'échec, nous revenons à la case départ, mais nous n'avons fermé la porte à aucune autre technique, notamment la technique traditionnelle d'auto-transplantation", a souligné le Pr Devauchelle.
Cette technique avait été écartée au profit d'une greffe dans le cas de la patiente d'Amiens, car ses blessures étaient trop difficiles à réparer.
Sans la greffe, il aurait fallu "3 à 5 opérations lourdes" pour "restaurer partiellement son visage", sans lui permettre de retrouver la faculté de parler ni manger normalement, selon le Pr Benoît Lengele, chirurgien à l'hôpital UCL de Bruxelles, impliqué dans l'opération.
Si le succès de la greffe se confirme, de telles opérations pourraient se renouveler. Cette greffe "est reproductible", a conclu le Pr Dubernard, annonçant la création d'un programme hospitalier conjoint entre les CHU de Lyon et d'Amiens pour développer cette technique.